Transport scolaire : « Attention à la pénurie de conducteurs d’autocars »
Intervenant sur le règlement des transports scolaires, Christelle Lapouge a alerté l’exécutif régional sur le risque de crise structurelle du secteur du fait de la pénurie de conducteurs et a proposé des pistes pour pallier le déficit d’attractivité du métier.
En effet, la grande difficulté à recruter de nouveaux conducteurs d’autocars tend à menacer la bonne réalisation du service de transport scolaire, comme ce fut déjà le cas dans d’autres régions. L’élu girondine, pointant du doigt le manque d’attractivité du métier, a ouvert deux pistes pour l’améliorer : le groupement des marchés pour éviter les journées hachées et l’augmentation des salaires, très bas malgré les responsabilités associées à cette mission.
Retrouvez l’intégralité de l’intervention de Christelle Lapouge en séance (seul le prononcé fait foi) :
Monsieur le Président, Monsieur le Vice-président, mes chers collègues.
Nous examinons l’actualisation du règlement des transports. Mais comme vous l’avez dit, les conditions actuelles de mise en œuvre sont pour la plupart pérennisées, et nous n’avons pas de raison de nous y opposer. En revanche, j’aimerais m’arrêter quelques instants sur un enjeu dont il est fait état dans la délibération : sur la pénurie de conducteurs d’autocars qui tend à menacer la bonne réalisation du service. D’ailleurs, de nombreux élus locaux, et ici même, connaissent cette réalité. Pour tenter d’y remédier, vous esquissez un certain nombre de mesures, dont le palier essentiel semble être la formation. Effectivement, mais pour former de nouveaux conducteurs, encore faut-il qu’il y ait une demande. Or, le principal écueil de ce métier est son manque d’attractivité, essentiellement pour deux raisons que vous ne traitez pas, ou peu dans cette délibération.
La première raison est l’organisation hachée des journées de travail. Vous connaissez cette difficulté puisque vous évoquez dans le rapport la possibilité de proposer des temps de travail accrus aux conducteurs, en privilégiant des logiques d’enchaînement de circuits de transports. Cette proposition serait une très bonne chose, mais nous nous rendons vite compte que c’est difficile à mettre en place, lorsque vous écrivez ensuite que cela implique de travailler avec les services de l’Éducation nationale sur les horaires des établissements. Je crains malheureusement que les logiques de transport ne dictent pas les horaires et ne les dicteront pas plus demain, qu’aujourd’hui.
Une piste qui n’est pas abordée non plus dans ce projet tient à la possibilité de grouper des marchés, ce qui permettrait aux conducteurs d’enchaîner le ramassage scolaire avec par exemple des sorties scolaires ou des activités scolaires. Est-ce un usage qui est déjà pratiqué ou pouvons-nous l’envisager?
La deuxième difficulté, et pas des moindres, dont je regrette qu’il n’en soit pas fait mention sur cette délibération est le niveau de rémunération. Sauf à rester sourd aux revendications des conducteurs, il est un peu décevant d’évoquer la difficulté à recruter sans mentionner ce point. Le montant du salaire minimum brut dans notre pays s’élève à 10,57 € par heure. Pour les conducteurs, le salaire minimum conventionnel est à peine plus élevé; il est de 10,82 euros de l’heure. Ajoutez à cette problématique, le temps partiel subi, et l’interruption de l’activité pendant les vacances scolaires. Le tout mis bout à bout fait une rémunération finale très faible, pour un métier qui pourtant comporte son lot de responsabilités, puisqu’il s’agit de transporter nos enfants. Disons le même plus concrètement, il est difficile pour nos conducteurs de vivre décemment s’ils n’ont pas un complément de revenu par ailleurs, et ce malgré une amplitude horaire très contraignante. Or, si les hausses de salaire ne sont pas du ressort direct des collectivités, la frilosité des transporteurs à engager ces hausses tient aussi à la difficulté à les répercuter. Effectivement, il est très difficile de les répercuter au moment de la négociation du contrat, car bien sûr les collectivités vont avoir tendance à rechercher les coûts les plus faibles, et nous pouvons le comprendre. Il est également difficile de les répercuter au cours de l’exécution du contrat, car les clauses de révision ne prennent pas en compte ces indicateurs de la filière.
Alors, que faisons-nous? D’après cette délibération, en tout cas pas assez, d’autant que vous n’associez pas d’indicateurs de performances aux mesures proposées. J’espère avoir démontré que ces mesures sont insuffisantes pour pallier aux difficultés de recrutement. Je comprends bien les contraintes budgétaires qui sont les vôtres, mais tout est une affaire de priorité. Le fait est que nous avançons à grands pas vers une crise structurelle du secteur, et nous ne pouvons pas nous, élus régionaux, nous contenter d’attendre que nos enfants en pâtissent, comment en ont pâti, par exemple, plusieurs centaines d’élèves de la région Grand Est à la rentrée dernière.
Cela étant dit, Monsieur le Président, je vous confirme que nous voterons cette délibération, mais que nous souhaitons que la Région se penche prioritairement sur cette problématique dans les semaines à venir.
Je vous remercie.