Tensions de recrutement : « Un manque d’ambition et d’innovation »
Réagissant à l’adaptation du pacte régional d’investissement dans les compétences afin de réduire les tensions de recrutement, Daniel Dartigolles a déploré qu’il y ait autant de pistes non explorées dans le plan proposé par l’exécutif régional.
L’élu, vice-président de la commission de l’emploi, de la Formation professionnelle et de l’Apprentissage, a souligné le niveau exceptionnel des indicateurs économiques, permis en particulier par les dispositifs gouvernementaux. S’il a salué l’engagement de la Région dans le nouveau Plan de réduction des tensions de recrutement proposé par l’État, il a cependant déploré le manque d’ambition et d’innovation des outils identifiés dans la délibération, pourtant rendus possibles par des moyens complémentaires étatiques inscrits dans le Pacte (près de 24 M€ supplémentaires) et a proposé d’autres pistes comme le développement de plateformes de formation éphémères, la promotion des AFEST ou, encore, l’animation d’un dispositif d’immersion avec la constitution d’un vivier d’entreprises prêtes à recevoir des demandeurs d’emploi.
Retrouvez l’intervention de Daniel Dartigolles en séance (seul le prononcé fait foi) :
Madame la Présidente,
Mes chers collègues,
Par le biais de ce nouvel avenant au Pacte Régional d’Investissement dans les Compétences, vous vous engagez à intensifier les actions concertées État-Région au bénéfice de nos concitoyens les plus éloignés de l’emploi.
Depuis 1 an, la situation du marché du travail en nouvelle Aquitaine s’est complètement retournée, avec des indicateurs économiques revenus à leur niveau d’avant crise COVID :
– Taux de chômage à 7,3 %, revenu à son niveau de 2009 ;
– Baisse historique annuelle de 14 % des demandeurs d’emploi sans activité (- 42 000 pour la Nouvelle-Aquitaine), nous ramenant au volume de 2012 ;
– Hausse historique des contrats d’apprentissage en France et en Nouvelle-Aquitaine. Je n’y reviendrai pas, Geneviève DARRIEUSSECQ et Florent BOUDIÉ l’ont fait précédemment ;
– Enfin, et nous aurions pu donner d’autres indicateurs positifs, une augmentation annuelle de 15 % des recrutements en Nouvelle-Aquitaine, avec 2,2 millions de recrutements hors intérim.
Rappelons, comme ne le mentionne pas le projet de délibération, que ces excellents résultats économiques sont les fruits de la mobilisation intensive des outils gouvernementaux, avec la mise en place de plans structurels, comme la loi Avenir professionnel de 2018, le Plan d’Investissement dans les Compétences, le plan 1 Jeune 1 solution, ainsi que le déploiement de différents plans conjoncturels comme les prêts garantis par l’État (plus de 10 Md€ à destination de 70 000 entreprises néo-aquitaines), l’activité partielle pour 1,1 million de salariés néo-aquitains, ou bien les aides du plan de relance pour 3 Md€, qui pendant la crise COVID ont protégé nos salariés et nos entreprises, et ainsi permis la reprise économique actuelle, aussi vive que réactive.
L’évolution récente du marché du travail nécessite de trouver de nouveaux leviers d’action, afin à la fois de lutter contre le chômage longue durée, qui ne cesse de progresser en Nouvelle-Aquitaine (+ 4 % en un an) et de répondre aux besoins urgents de recrutement de nos entreprises, et afin de ne laisser personne au bord du chemin, au bord de la reprise économique.
Si nous saluons l’engagement de la Région dans le nouveau Plan de réduction des tensions de recrutement proposé par l’État, nous déplorons cependant le manque d’ambition et d’innovation des outils identifiés dans la délibération, pourtant rendus possibles par des moyens complémentaires étatiques inscrits dans le Pacte (près de 24 M€ supplémentaires). Hormis la prime exceptionnelle pour les entrées en formation des demandeurs d’emploi de longue durée, l’extension du dispositif Un Deux Toit aux sortants de formation, nous ne retrouvons essentiellement qu’une augmentation des places de formation déjà existantes et n’étant pas toutes saturées. La réponse consistant à préconiser toujours plus de places et supposant que l’offre de formation actuelle serait insuffisante est à relativiser et ne correspond en rien à la diversité des réalités territoriales. Dans ses propositions, le Conseil Régional la joue «petits bras», et aurait pu, aurait dû changer de braquet, en complémentarité avec les dispositifs partenariaux et au regard de l’urgence liée à la pénurie de recrutements.
Ainsi, nous pouvons vous livrer quelques pistes non explorées dans le projet de délibération. Par exemple :
– Le développement de plateformes de formation éphémères, au plus près des bassins de vie des demandeurs d’emploi et des besoins des entreprises ;
– L’accroissement des recrutements par simulation via l’octroi de subventions ;
– L’animation d’un dispositif d’immersion avec la constitution d’un vivier d’entreprises prêtes à recevoir des demandeurs d’emploi ;
– La promotion des AFEST, qui ne décollent pas (49 depuis 2019), avec la mise en place d’incitations financières ;
– L’optimisation de l’animation effective des 47 Comités territoriaux de la Formation, qui doivent impliquer beaucoup plus d’acteurs, des acteurs autres que les membres du service public de l’emploi comme les Chambres consulaires, les Filières économiques ou les Services économiques des EPCI. Et là, c’est essentiel, ces fameux Comités territoriaux de la Formation, c’est là où s’identifient, bassin d’emploi par bassin d’emploi, les besoins de recrutement au plus près des besoins des entreprises ;
– Enfin, l’accompagnement par les organismes de formation des stagiaires en fin de formation en complémentarité avec les dispositifs existants des membres du Service public de l’emploi dans l’esprit de la plateforme numérique Talents d’Ici.
Autant de pistes non explorées dans cette délibération, qui, nous l’espérons, pourront l’être dans la future feuille de route Recruter visant à agir sur l’attractivité des métiers, les conditions de travail ou le développement économique ; autant de réserves qui nous amènent, Madame la Présidente, à nous abstenir.