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Tribune d'expression des groupes politiques de la Région Nouvelle-Aquitaine

Budget supplémentaire : « Un décalage trop important entre le discours et les actes »

Intervenant sur le budget supplémentaire, Christian Devèze a regretté un écart conséquent entre les satisfecit de l’exécutif et l’effort réel constaté.

En particulier, le conseiller régional a regretté que ce budget supplémentaire n’ait pas été l’occasion d’une inflexion politique et qu’ainsi, tous les regrets formulés par les élus centristes lors du vote du budget primitif se soient confirmés.

Il note, par exemple, un manque d’ambition s’agissant du rééquilibrage des territoires avec, en particulier, de nouvelles annulations pour la politique de la ville – sur laquelle le groupe MoDem et Union centriste avait souvent alerté lors du précédent mandat.


Retrouvez l’intervention de Christian Devèze en séance (seul le prononcé fait foi) :

M. le Président, mes chers collègues,

Ce Budget Supplémentaire 2021 est effectivement le premier rendez-vous budgétaire de cette nouvelle mandature. Et il est, pour moi, une toute première, tout simplement. Soucieux de me familiariser avec les usages de notre Assemblée, je suis donc allé consulter d’anciens documents budgétaires, des Budgets Supplémentaires en premier chef, et j’ai été surpris du changement de ton adopté par le document qui nous occupe aujourd’hui.

Comme l’a opportunément souligné Florent BOUDIÉ lors de la tenue de la Commission des finances le 7 octobre dernier, il témoigne à l’évidence d’une démarche avant tout politique. J’en veux pour preuve les superlatifs qui jalonnent le rapport de présentation.

Une attitude surprenante qui consiste à donner à ce qui devait être un complément, au mieux, un affinement du Budget Primitif, de nouvelles perspectives. L’orateur précédent est allé, effectivement, un peu dans ce sens. Moi, je resterai sur la définition du Budget, du Budget Primitif, du Budget Supplémentaire, des modifications qui peuvent intervenir également, des Décisions Modificatives… Mais les prospectives relèveront du débat d’Orientations Budgétaires.

La question que nous nous posons est de savoir s’il s’agit d’une réorientation politique à peine masquée, ou de l’amorce de nouveaux engagements massifs. Je vous propose d’examiner l’une et l’autre des hypothèses.

Inflexion politique : là encore, je me suis modestement positionné comme un nouvel Élu régional, et je m’en suis référé aux remarques faites lors de l’examen du vote du budget primitif, notamment par mon excellente collègue, Pascale REQUENNA. Force est de constater que les regrets qu’elle avait exprimés sont confortés par la présentation du document budgétaire d’aujourd’hui. Prenons par exemple l’aménagement du territoire : le groupe MoDem-Union centriste avait, à juste titre, me semble-t-il, souligné un manque cruel d’engagement s’agissant de la politique de la ville. Loin de combler ces lacunes, ce Budget Supplémentaire consacre des annulations à hauteur de 200 000 euros en AP, et plus d’1,7 million d’euros en crédits de paiement. Sur la politique contractuelle, pour poursuivre sur le sujet du développement de territoires, on note des annulations de plus d’1,5 million d’euros de crédits de paiement en investissements, de plus de 800 000 euros en crédits de paiement en fonctionnement, de 700 000 euros en AP et de plus de 900 000 euros en AE. Sans qu’un mot ne soit mentionné à ce sujet dans votre rapport.

De manière générale, c’est le pilier 3 qui souffre le plus de ces ajustements, avec plus de 11 millions d’annulations et de crédits de paiement en investissements. Certains, bien évidemment, se justifient. Mais nous regrettons simplement que soient mélangés pêle-mêle des ajustements rendus nécessaires, certes, par le contexte sanitaire que rappelait Sandrine DERVILLE, et des désengagements qui ne font que confirmer vos choix politiques antérieurs.

S’il n’y a pas d’inflexion politique, y a-t-il donc un volume d’interventions à ce point augmenté qu’il justifierait une présentation aussi politique ? Mes collègues du groupe, au nom desquels j’ai l’honneur de m’exprimer ce jour, avaient pour habitude de regretter l’écart entre les annonces et ce qui était réellement réalisé lors de l’examen des comptes administratifs. Il en est de même sur certains points dans ce document, entre ce qui est écrit et le réel. Nous constatons, là encore, des deltas significatifs, que toute la littérature du monde ne saurait masquer.

Prenons les infrastructures de transport ferroviaire : ce sont 212 millions d’euros d’autorisations nouvelles inscrites en investissement. Seulement, lorsque l’on se réfère au document comptable, on constate des annulations d’Autorisations de Programme d’exercices antérieurs, à hauteur de plus de 78 millions d’euros, ce qui ramène vos efforts d’investissement à un nombre bien inférieur par rapport à ce qu’il est annoncé, et les exemples sont légion et pourraient être renouvelés.

Il s’agit, certes, de procédés budgétaires tout à fait classique. Nous ne les aurions pas signalés ou soulignés si le rapport de présentation en faisait mention claire. Notre critique porte davantage sur la volonté manifeste d’amplifier l’effort réel.

J’en viens enfin à une considération plus technique sur ce point. Vous avez procédé à ce que l’on pourrait qualifier d’un nettoyage comptable des vieilles Autorisations de Programme et d’Engagement qui étaient encore dans les tuyaux : c’est heureux. Je ne peux qu’encourager sa poursuite, car il est bien loin d’être achevé. Certaines lignes de programmes, M. le Président, datent même de vos débuts à la présidence de cette Assemblée. D’autres, bien qu’un peu plus récentes, ne donnent lieu à des crédits de paiement que depuis quelques années. La poursuite du nettoyage apporterait une clarté salutaire à la compréhension de toutes ces pages.

Ces considérations exprimées, j’en terminerai par plusieurs interrogations auxquelles nous n’avons pas trouvé réponse. En premier lieu, au sujet des fonds européens et du FEDER, si vous me le permettez : on constate un nombre important de dépenses annulées qui concernent l’économie innovante, la transition vers une économie décarbonée, les usages numériques, etc. Cela représente un peu plus de 17 millions d’euros. Nous nous interrogeons vraiment sur les conséquences que ces annulations peuvent avoir sur les prochaines programmations. Pouvez-vous nous rassurer sur ce risque ?

Autre motif d’inquiétude non négligeable en ces temps difficiles de sortie progressive du tunnel pandémique : Geneviève DARRIEUSSECQ vient de souligner l’importance de la formation professionnelle. Or, précisément, sur le volet apprentissages, on lit l’annulation de 7 millions d’euros de crédits de paiement en Autorisations d’Engagement, soit quand même 70 % du voté au Budget Primitif. Mme la Première Vice-Présidente nous a indiqué, en Commission des Finances, qu’il s’agissait là d’une économie d’opportunité consécutive au faible nombre de demandes de prise en charge émises par les entreprises employant des apprentis. Pour évoluer quotidiennement dans ce secteur, le secteur régional des entreprises TPE et PME, je puis vous assurer que les besoins existent réellement, même si l’urgence, pour ces structures, est de relancer au plus vite leur activité. N’y a-t-il pas donc possibilité de nous questionner au plus vite sur l’efficacité de nos outils de communication en la matière, plutôt que de s’abriter derrière l’argument, sans doute un peu facile, d’un nombre faible de demandes ? Jamais l’aide publique et les prises en charge ne sont plus utiles qu’à la sortie de ce type de crise.

Enfin, nous avons relevé des dépenses nouvelles pour les infrastructures routières. Or, M. le Président, si je suis bien informé, vous aviez déclaré ne plus vouloir vous engager pour les routes. Il s’agit certes d’opérations de modernisation, et de rénovation des routes, mais cela reste des investissements routiers. Le propos avait peut-être été mal compris, mais, là encore, il s’agit de clarifications : soit un changement de braquet, soit d’orientations, dont, je le dis clairement, nous ne nous plaindrions pas.

Voilà, M. le Président, ce que je pouvais vous dire. Au nom de mon groupe, je vous remercie, mes chers collègues, pour votre écoute.